Tindouf – le destin d’une citée, terre d’’échange et de fraternité devenue un bagne tristement célèbre

tinddooufAu sud de la Hamade du Drâa, dominant une vaste Sebkha, et dans une vallée bien pourvue d’eau, la cité de Tindouf fut construite au XVI siècle. Les caravanes du sud du Maroc, du Chenguit et de Tombouctou se rencontraient pour des échanges commerciaux et parfois pour concilier des différends entre tribus autour de ce point d’eau. C’est en vertu d’un arrêté résidentiel du 5 aout 1933 que le plan de pacification du sud marocain comportait l’occupation de Tindouf, qui était encore jusqu’au début des années 50 du siècle dernier officiellement marocaine.

Malgré l’occupation et son rattachement par la suite à l’Algérie, qui l’a hérité dans le cadre des frontières limitées par les accords d’Evian en 1962, Tindouf a gardé, jusqu’à la fin des années 60 du siècle dernier, sa vocation de point de coopération maghrébine et subsaharienne. Une foire annuelle était organisée avec la participation des états riverains et les caravanes chamelières étaient remplacées par des files de camions et d’engins à quatre roues de toutes sortes, et qui s’étendaient sur des dizaines, sinon des centaines de kilomètres. Le conflit de 1963 passé et oublié, apparemment, l’Algérie et le Maroc se sont rendu compte qu’ils sont condamnés à la coopération. Les facteurs d’unité et de rapprochement sont plus nombreux que ceux qui les divisent.

Encore une fois, Tindouf allait jouer son rôle de point de convergence, et donc premier embryon d’une intégration algéro-marocaine. Les accords signés entre les deux pays à Ifrane le 15 Janvier 1969, sur la délimitation frontalière et l’exploitation commune des gisements de fer de Gara Djebilet au sud de Tindouf, ont scellé le bon voisinage et la coopération.

C’est en 1975, et dans une atmosphère de crise régionale et internationale, que feu Boumediene a cru que l’impérialisme voulait abattre ou, du moins, neutraliser les régimes progressistes. La récupération par le Maroc du Sahara viserait dans cette optique à renforcer le Maroc au détriment de l’Algérie. En quelques semaines, le visage de Tindouf s’est transformé, militarisé et édifié en base arrière pour déstabiliser le Maroc, et en camps de concentration crées par un exode provoqué par le Polisario, l’Algérie et certains éléments de l’armée espagnole. Victimes d’une cruelle déportation et transplantation, déracinés et coupés de leurs origines, des milliers de pauvres marocains sahraouis sont toujours séquestrés et inhumainement traités dans les camps de la honte à Tindouf.

Mais pourquoi donc Tindouf ?

Si l’on croit Paul Balta, correspondant de « Le Monde » à Alger dans les années 1970 et auteur de l’ouvrage « Le Grand Maghreb », feu Boumediene n’a pas exclu, à l’époque, que son plan visait à créer, par Polisario interposé, un pôle d’équilibre pour contrecarrer le Maroc au sud. Ce pôle va de l’aire de la mouvance traditionnelle des maures, s‘étendant de l’oued Drâa au fleuve du Sénégal, dans lequel sera inclus Tindouf comme base dominante, et pourquoi pas comme capitale. La révélation de Balta livre une réponse plausible à l’interrogation qui se posait sur les raisons de l’empressement de l’Algérie à créer sa RASD à Tindouf dès le début du conflit saharien en 1976, acte unique dans les annales du droit international. Mais les courtes vues ne sont pas toujours payantes. Hier, historiquement une terre où l’on rencontre une diversité de races et des affinités ethniques entre les Tadjakants, les Ouled Bousbâa, les Aït Oussa, les Rguibats, les Ouled Dlim et autres, l’histoire de Tindouf est aujourd’hui souillée par les odieux crimes commis sur son sol et les saints de la ville pleurent dans leurs tombes ce triste destin.

Les séquestrés marocains sahraouis non encore officiellement recenser sont retenus comme otages pour être troqués. La reconnaissance par la communauté internationale et les constats des souffrances représenteraient pour les otages de Tindouf une forme de justice en attendant la délivrance.

Dans tout acte politique, il n’y a rien de plus exigeant que la vérité. Il est fallacieux de s’employer à la cacher car l’histoire décidera qui a manqué à qui, et opposera en dernier ressort son sceau.

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